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La conduite sexuelle et l’utilisation de contraceptifs parmi les jeunes en Afrique de l’Ouest

(Mars 2009) De par le monde, les jeunes – surtout les jeunes femmes – connaissent un fort taux de VIH et de grossesse non désirée à cause de leurs connaissances limitées concernant la santé sexuelle et reproductive. Les conduites sexuelles parmi les jeunes peuvent inclure des pratiques positives, telles que l’abstinence et l’utilisation de préservatifs ou mener à des débouchés négatifs tels qu’une grossesse non désirée et la propagation de maladies sexuellement transmissibles (MSTs). Les connaissances en matière de contraceptifs et de leur utilisation sont d’importants indicateurs de santé sexuelle parmi les jeunes. Les conduites sexuelles et l’utilisation de contraceptifs varient non seulement entre les pays et régions mais elles varient aussi au sein d’un même pays. Cet article examine les données tirés des Etudes Démographiques et de Santé (EDS) menées dans trois pays francophones d’Afrique de l’Ouest : le Burkina Faso, le Mali et le Sénégal et explore les variations de connaissances et de pratiques sexuelles parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans dans ces pays. Avec ces informations, les décideurs et les responsables de programmes peuvent mettre sur pied des programmes qui répondent plus efficacement aux besoins en santé sexuelle et reproductive des jeunes.

Conduites sexuelles des jeunes

Pour réduire le risque de débouchés néfastes parmi les jeunes femmes, il faut tout d’abord comprendre leur conduite sexuelle. Le niveau d’activité sexuelle parmi les jeunes femmes célibataires était similaire au Mali et au Burkina Faso mais les expériences rapportées par les jeunes Sénégalaises étaient très différentes (voir figure 1). Au Mali et au Burkina Faso, 30 à 40 % des jeunes femmes célibataires ont indiqué être sexuellement actives. En revanche, seuls 4 % des jeunes Sénégalaises célibataires ont rapporté avoir eu des relations sexuelles, ce qui constitue un des niveaux les plus bas en Afrique sub-saharienne. L’âge médian du premier rapport sexuel était le plus bas parmi les femmes au Mali (15,9 ans) suivi du Burkina Faso (17,5 ans). Au Sénégal, l’âge médian du premier rapport sexuel était parmi les plus élevés de l’Afrique sub-saharienne avec 19,6 ans. Comme on pouvait s’y attendre, l’expérience sexuelle augmente avec l’âge. Au Burkina Faso et au Mali, la probabilité que les femmes aient eu des rapports sexuels augmente avec l’âge : 67 % pour les femmes de 20 ans et 68 % pour celles de 24 ans mais au Sénégal, les niveaux d’activité sexuelle, même parmi les femmes âgées de 20 à 24 ans, étaient relativement bas, 8 % seulement.


Figure 1
Femmes célibataires de 15 à 24 ans indiquant être sexuellement actives

Source: Shane Khan et Vinod Mishra, Rapports Comparatifs EDS # 19, Santé Reproductive et Sexuelle.


Des facteurs spécifiques tels que l’éducation, le lieu de résidence et le niveau de revenus sont souvent associés aux niveaux plus élevés d’activité sexuelle. Au Burkina Faso et au Mali, le pourcentage de femmes qui rapportent être sexuellement actives a augmenté selon le niveau d’éducation plus élevé, la résidence urbaine et l’accroissement des revenus de la famille. Toutefois, au Sénégal, selon les EDS, aucun de ces trois facteurs n’a eu d’effet sur l’activité sexuelle. Par exemple, quel que soit le niveau d’éducation, seuls 4 % des femmes célibataires sénégalaises entre 15 et 24 ans ont indiqué être sexuellement actives. Inversement, les jeunes femmes célibataires d’un niveau d’éducation plus élevé au Burkina Faso avaient presque deux fois plus de chance d’avoir eu des rapports sexuels que les femmes célibataires qui n’avaient jamais été à l’école (45 % contre 24 %). De même au Burkina Faso, deux fois plus de jeunes femmes des groupes les plus riches ont rapporté avoir eu des rapports sexuels que les jeunes femmes du groupe le plus pauvre.

Utilisation comparative parmi les jeunes

Parmi les jeunes sexuellement actifs, l’utilisation de contraceptifs réduit le nombre de grossesses non désirées. Toutefois, avant d’utiliser un contraceptif, les jeunes doivent connaître diverses méthodes. Au Sénégal et au Burkina Faso, plus de 85 % des jeunes femmes qui ont participé à l’enquête connaissaient au moins une forme de contraception moderne mais beaucoup moins (67 % et 66 % respectivement) connaissaient trois ou plus méthodes modernes. Les connaissances au Sénégal étaient plus faibles, seulement 76 % des jeunes femmes connaissant une méthode et 56 % trois méthodes ou plus.

Etant donné les niveaux relativement élevés de connaissances des contraceptifs parmi les jeunes femmes, l’utilisation de contraceptifs est relativement faible parmi les femmes mariées, mais plus haut parmi les femmes célibataires sexuellement actives. Au Burkina Faso, seuls 8 % des femmes jeunes et mariées utilisent la contraception moderne ; inversement, 56 % des femmes jeunes célibataires sexuellement actives utilisent une forme de contraception moderne. La prévalence parmi ces deux groupes de jeunes femmes au Mali était plus faible : 6 % parmi les jeunes femmes mariées et 20 % parmi les jeunes femmes célibataires. Au Sénégal, 6 % des jeunes femmes mariées utilisent une méthode de planification familiale mais le nombre de femmes célibataires sexuellement actives était si faible que l’enquête n’a pas pu déterminer un taux de prévalence. Dans les trois pays, le nombre de jeunes femmes sexuellement actives était relativement faible. Bien que leur utilisation de contraceptifs puisse être plus élevée, elles représentent un très faible pourcentage des jeunes femmes.


Figure 2
Utilisation de la contraception moderne parmi les femmes de 15 à 24 ans

Source: Shane Khan et Vinod Mishra, Rapports Comparatifs EDS # 19, Santé Reproductive et Sexuelle.


La vie dans une zone urbaine est associée à l’utilisation de contraceptifs pour les jeunes femmes mariées dans les trois pays. La plus grande différence a été notée au Burkina Faso où 31 % des jeunes femmes mariées dans les zones urbaines utilisaient des contraceptifs comparé à seulement 4 % en zone rurale. Le niveau d’éducation était aussi associé à une utilisation plus forte de contraceptifs modernes parmi les jeunes femmes mariées. Dans les trois pays, les jeunes femmes mariées qui avaient une éducation secondaire avaient beaucoup plus de chances – trois fois plus – d’utiliser une contraception moderne que les femmes n’ayant reçu qu’une éducation primaire. De même, les jeunes femmes mariées dans le quintile de richesse le plus élevé ont rapporté des niveaux plus hauts d’utilisation de la contraception moderne (14 contre 28 %), comparé au groupe le plus pauvre, où la prévalence n’était que d’1 ou 2 %.

Efforts des programmes pour répondre aux besoins des jeunes adultes

Au cours des dernières années, nombre d’efforts ont été faits dans les trois pays pour aider les jeunes gens à avoir une meilleure compréhension de la santé sexuelle et reproductive et améliorer leur accès aux services de planification familiale. Puisqu’une bonne partie de la population vit en zone rurale, il est parfois difficile d’atteindre les jeunes. Toutefois, les jeunes gens représentent un fort pourcentage de la population et, sans accès aux informations et services, ils risquent de connaître des déboires.

Au Burkina Faso, par exemple, le Programme National pour la Santé de la Reproduction des Adolescents a été lancé en 1995. Les efforts pour collecter les informations ont permis d’augmenter la sensibilisation au VIH/sida, à la violence basée sur le genre et d’améliorer la qualité des services de soins de santé. D’autres efforts ont vu l’ouverture de centres de jeunes qui fournissent une éducation en planification familiale, des conseils et l’éducation par les pairs. Un autre programme a formé les enseignants aux questions d’éducation sexuelle et de population. Un certain nombre d’efforts se sont focalisés sur l’augmentation de la sensibilisation à la prévention du VIH/sida parmi les jeunes.1

Des efforts similaires au Mali se sont focalisés sur la sensibilisation des jeunes adultes. L’effort pour former les éducateurs-pairs et les jeunes dirigeants en santé sexuelle et reproductive ont contribué à augmenter l’utilisation des contraceptifs parmi les jeunes adultes dans les zones où le programme est en place. Un programme d’éducateur-pair a formé 2 000 volontaires qui ont atteint plus de 630 000 jeunes âgés de 10 à 24 ans.2

Les programmes au Sénégal ont permis d’intervenir tant au niveau de la politique de gestion qu’au niveau de la fourniture de services directs aux jeunes. Les efforts couronnés de succès des plaideurs ont mené à l’incorporation de la santé reproductive des adolescents au sein du Ministère de la Santé et du Ministère de l’Education, des Sports et des Jeunes. Les programmes incluent des curricula pour les éducateurs pairs, la formation pour les professeurs et la mise au point de normes et lignes directrices en santé de la production pour adolescents.3

Comprendre les conduites sexuelles des jeunes et l’utilisation des contraceptifs doit aider à améliorer les politiques de gestion qui traitent de la connaissance et de la conduite en santé de la reproduction parmi les jeunes femmes dans les pays tels que le Burkina Faso, le Mali et le Sénégal. Des connaissances accrues peuvent autonomiser les femmes en matière de santé de la reproduction et d’accès aux ressources de planification familiale quand les besoins ne sont pas satisfaits. L’amélioration des conduites et connaissances en matière de santé reproductive parmi les jeunes peuvent mener à une réduction de la propagation des MST, y compris l’infection VIH, ainsi qu’a moins de grossesses non désirées, ce qui permettra l’émergence d’une génération plus saine de familles.


Grace Dann était stagiaire aux Programmes Internationaux du PRB.


Références

  1. Institut Guttmacher, “Adolescents in Burkina Faso: Sexual and Reproductive Health,” Research in Brief Series, No. 3, lu en ligne à l’adresse suivante www.guttmacher.org, le 13 février 2009.
  2. Elizabeth T. Robinson, “Programs for Adolescents: Neighborhood Peer Educators in Mali,” Network 20, no. 3 (2000), lu en ligne à l’adresse suivante www.fhi.org, le 11 février 2009.
  3. Nafissatou Diop et Anta Fall Diagne, “Mainstreaming Adolescent Health in Senegal: Enhancing Utilization of the Findings from the Youth Reproductive Health Project,” Rapport FRONTIERS (Dakar: Population Council, 2007), lu en ligne à l’adresse suivante www.pcdc.org, le 11 février 2009 et le Centre for Development and Population Activities, Reproductive Health for Youth in Mali Project: Rapport de fin de Projet (Washington, DC: The Centre for Development and Population Activities, 2003), lu en ligne à l’adresse suivante ww.cedpa.org, le 11 février 2009.